Avec ses balcons de bon goût ornant le vaste amphithéâtre en forme de dôme, il représentait alors pour moi tout ce qui était cultivé, raffiné et civilisé, le produit de générations de décents citoyens britanniques et de leurs gracieuses majestés. Mais ce soir là, le temple de la respectabilité allait être mis-à-mal par les Mothers Of Invention, un joyeux cirque chevelu à trois pistes avec Frank comme Monsieur Loyal. Le groupe rugissait et s'éclatait sur scène. Les Mothers balançaient leurs chansons rancunières habituelles, Frank contrôlant tout avec le sourire qu'on lui connaît Le public n'était pas très em- ballé par les standards américains et Zappa semblait frustré de l'impos-sibilité de le mettre à ses pieds. Peu importe si cela avait été programmé ou si c'était un acte inspiré par le désespoir, je n'ai jamais su,toujours est-il qu'au beau milieu d'un morceau le clavier abandonna ses touches d'ivoire et commença à escalader péniblement les hauts-parleurs et autres empilements de matériel électronique.
Un frisson d'appréhension parcouru la foule et le musicien disparu un instant happé par l'obscurité. Puis une poursuite finit par le retrouver, petite figurine colorée grimpant de plus en plus haut à l'arrière del'auditorium, à travers une gigantesque monta- gne formée par les tuyauxdu grand orgue du Royal Albert Hall.
Le public l'encourageait et Frank fit redémarrer le groupe -Tu peux y arriver - Bouges-toi enfoiré - Oui, Oui !. Avec la foule l'encourageant et l'applaudissant, ce quasimodo musical atteignit le sommet et se ficha devant le pupitre. Il y eu un court instant de silence absolu quand il se débâtît avec les manettes. Soudain ce fut le plus glorieux son outrageant jamais entendu... Non, ce n'était pas du Elgar ou du Bach, encore moins du Saint-Saens!
Cela ressemblait à un énorme éternuement musical tonitruant de nez bouché! Il martelait "Louie-Louie" sur les grandes orgues victoriennes!  
Les Barbares avaient débarqués! Cela avait dû se passer comme cela quand ils avaient hissé le marteau et la faucille sur le Winter Palace. Les iconoclastes étaient rois! C'était à la fois complément dingue et merveilleux à la fois...".
   SCRICTLY COMMERCIAL (1995)
Produit par Frank Zappa / Excepté "Trouble Every Day" par Tom Wilson - Cover Photo : JP Leloir - RYKO RCD - 40600 -
Tracklist: Peaches En Regalia • Don't Eat the Yellow Show • Dancin' Fool • San Ber'dino • Dirty Love • My Guitar Wants To Kill Your Mama • Cosmik Debris • Trouble Every Day • Disco Boy • Fine Girl • Sexual Harassment In The Workplace • Let's Make The Water Turn Black • I'm The Slime • Joe's Garage • Bobby Brown Goes Down • Montana • Valley Girl • Be In My Video • Muffin Man •

C'est le premier album que Frank n'aura pas supervisé: il s'est éteint le 4 décembre 1993, peu avant seize heures, après avoir longtemps lutté contre un cancer de la prostate diagnostiqué tardivemant.
Mothafucker. . . c'est donc une première compile! le choix des morceaux est forcément subjectif et ce ne sont pas la qualité de la gravure ou la beauté de quelques photos inédites qui pourront nous consoler. Le livret contient pourtant une perle: le témoignage de Terry Gilliam, l'américain des Monthy Pythons réalisateur de Brazil - Fischer King - Las Vegas Parano - L'Armée des Douze Singes etc... et que je vous livre traduite ci-dessous. Après le créateur des Simpson's, voici un autre exemple de l'influence de Frank sur pas mal d'artistes contemporains, même s'il s'en est toujours défendu lors de toutes ses interviews. Modeste était le Zappounet...
Terry Gilliam: -"C'était en 1967. Je venais de quitter l'Amérique pour l'Angleterre. Un soir d'automne, errant à travers Hyde Park, je tombe nez-à-nez avec le manager de Frank que je connaissais depuis mes années d'études à Los Angeles. "- Tu veux aller les voir ? - Tu parles !" Le Royal Albert Hall est un énorme monument Victorien, tout de rouge et d'or vêtu et surchargé d'une décoration élaborée...

Nous avons rigolé et l'avons acclamé. Le sourire ironique de Frank ornait à nouveau son visage comme jamais! J'ai décidé alors que çà valait le coup de rester en Angleterre. Quand il s'agissait d'abattre les vaches sacrées avec autant de crudité et de perfection dans la précision musicale, il n'y avait personne de meilleur que Frank. Quel genre de chansons apprend-il aux anges maintenant ? Bonne chance Dieu! Tu as les mains pleines cette fois-ci !" -    Traduction tirée du livret- ©2008 Zappa In France